Éthique, car il est inacceptable d’accepter de condamner définitivement un jeune à partir de son parcours initial, de considérer son échec scolaire comme irrémédiable, de se dire qu’il n’y a plus rien à faire, puisque tout a déjà été tenté, de ne rien faire pendant les deux ans passées au CFA pour essayer de le sortir de la spirale de l’échec. Éthique, parce que nos convictions sont à l’opposé des théories innéistes de l’intelligence et parce que nous croyons que l’échec peut très rarement être imputé à des déficiences intellectuelles, mais plutôt à l’insuffisance de médiations pendant l’enfance, à l’absence d’aide pour le travail scolaire à la maison ou à des blocages, voire des traumatismes engendrés par des situations familiales insupportables. Éthique, car nous refusons d’accepter que le déterminisme social cher à Bourdieu pèse si lourd qu’il n’y ait guère d’issue pour les enfants des milieux défavorisés.

     Économique, car ne pas donner aux jeunes en échec une formation professionnelle de qualité relève du gâchis. Économique, parce que de nombreuses professions manquent de main-d’œuvre qualifiée ; former les jeunes en échec, c’est répondre à ces besoins de main-d’œuvre, c’est l’intérêt des entreprises et c’est l’intérêt des jeunes. Économique enfin, parce que l’insertion sociale passe par l’insertion professionnelle. Donner une formation à des jeunes en échec et leur permettre d’accéder à l’emploi, c’est donc prévenir la délinquance et anticiper les mesures de réinsertion qui coûtent très cher et sont souvent inefficaces, parce que trop tardives.

     Réaliste, car le CFA ne recrute pas de jeunes en difficulté. Il les découvre, quand le contrat est signé ; il est placé devant le fait accompli. Il lui faut bien alors imaginer des solutions pour prendre en charge ces jeunes !

     Efficace et juste, car on ne règle pas le problème des inégalités par un traitement égalitaire, et il est indispensable  » de donner plus à ceux qui ont le moins « .

    Enfin, la prise en charge de ces jeunes n’est pas incompatible avec la recherche de l’élévation des niveaux de qualification. Ces actions se complètent. Les entreprises ont certes besoin de repreneurs, mais aussi de salariés qualifiés, et des parcours étonnants ont apporté la preuve qu’on peut accéder à l’apprentissage en grande difficulté et se retrouver quelques années plus tard chef d’entreprise.

Cette volonté de laisser le minimum de jeunes au bord de la route s’exprime :

  • Essentiellement à travers le PPR, dispositif de remédiation sur les savoirs et compétences de base, auquel l’établissement consacre pratiquement 2,5 postes de formateurs,
  • Mais aussi par la convention signée avec l’AGEFIPH pour l’accueil de jeunes handicapés cognitifs,
  • Et enfin dans la médiation sociale et l’aide apportée par l’assistante sociale et l’association qui peut venir en aide aux plus démunis.